Contrat de Saisonnier : 19 janvier 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/02032

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Contrat de Saisonnier : 19 janvier 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/02032
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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 2

ARRET DU 19 JANVIER 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/02032

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/11505

APPELANTE

FÉDÉRATION NATIONALE CGT DES PERSONNELS DES SOCIETES

D’ETUDES, DE CONSEIL ET DE PREVENTION

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Evelyn BLEDNIAK de la SELARL ATLANTES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0093, avocat postulant

Représentée par Me Benjamin CORDIEZ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant

INTIMES

SYNDICAT NATIONAL DES PRESTATAIRES DE SERVICES D’ACCUEIL D’ANIMATION ET DE PROMOTION ( SNPA )

pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Pascal PETREL, avocat au barreau de PARIS, toque : D0016, avocat postulant et plaidant

SYNDICAT NATIONAL DES ORGANISATEURS ET REALISATEURS D’ACTIONS PROMOTIONNELLES ET COMMERCIALES ( SORAP )

pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par Me Pascal PETREL, avocat au barreau de PARIS, toque : D0016, avocat postulant et plaidant

FEDERATION COMMUNICATION CONSEIL CULTURE F3C CFDTT

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée par Me Jonathan CADOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R222, avocat postulant et plaidant

FEDERATION COMMERCE SERVICE FORCE DE VENTE ( CFTC CSFV )

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5]

[Localité 2]

défaillante

FEDERATION NATIONALE DE L’ENCADREMENT DU COMMERCE ET DES SERVICES ( FNECS CFE CGC ) prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 2]

défaillante

FEDERATION DES EMPLOYES ET CADRES FORCE OUVRIERE ( FEC FO )

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 7]

[Localité 2]

défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 10 novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine MÉTADIEU, Président

Madame Martine CANTAT, Conseiller

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

– réputé contradictoire

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.

**********

Statuant sur l’appel interjeté par la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention à l’encontre d’un jugement rendu le 15 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

– débouter la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention de ses demandes

– débouter le syndicat national des prestataires de service d’accueil, d’animation et de promotion (Snpa) et le syndicat national des organisateurs et réalisateurs d’actions promotionnelles et commerciales (Sorap) de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 13 avril 2016 de la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention qui demande à la cour de :

– constater que l’accord du 10 mai 2010 «portant dispositions spécifiques à l’activité d’optimisation linéaire» méconnaît les dispositions de la convention OIT 158,

– constater que l’accord du 10 mai 2010 «portant dispositions spécifiques à l’activité d’optimisation linéaire» méconnaît les dispositions de la directive 1999/70 CE et de l’accord cadre du 18 mars 1999,

– constater que l’accord du 10 mai 2010 a pour finalité de pourvoir durablement au moyen de contrats de travail à durée déterminée des emplois liés à l’activité normale et permanente des entreprises concernées,

– dire que l’accord litigieux méconnaît les dispositions des articles L.1242-1 et L.1242-2 du code du travail,

– constater qu’il laisse à la seule discrétion de l’employeur la possibilité pour le salarié embauché en contrat de travail à durée déterminée d’accéder à un emploi en contrat de travail à durée indéterminée,

– constater que l’accord litigieux méconnaît le principe d’égalité de traitement prescrit par les dispositions de l’article L.3123-11 du contrat de travail,

– constater que l’accord litigieux opère discrimination des salariés embauchés en contrat de travail à durée déterminée au sens de l’accord cadre du 18 mars 1999 intégré à la directive 1999/70 CE,

En conséquence,

– ‘réformer’ le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

– prononcer l’annulation de l’accord collectif de branche étendu du 10 mai 2010 dénommé «Accord portant dispositions spécifiques à l’activité d’optimisation linéaire»,

– condamner le Sorap et le Snpa au paiement de la somme de 4 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 9 juin 2016 du syndicat national des prestataires de service d’accueil, d’animation et de promotion (Snpa) et du syndicat national des organisateurs et réalisateurs d’actions promotionnelles et commerciales (Sorap) qui demandent à la cour de:

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention,

– constater la parfaite validité de forme et de fond de l’accord collectif de branche du 10 mai 2010 portant dispositions spécifiques à l’activité d’optimisation linéaire,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il les a déboutés de leurs demandes reconventionnelles

En conséquence,

– débouter la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention au paiement au Snpa et au Sorap de la somme d’un euro symbolique en réparation du préjudice subi en raison du manquement à l’obligation de loyauté inhérente à toute négociation collective,

En toute hypothèse,

– condamner la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention au paiement de la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu les conclusions signifiées le 10 juin 2016 par la fédération Communication Conseil Culture Cfdt (F3C Cfdt) qui demande à la cour de :

– déclarer la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention mal fondée en ses demandes,

En conséquence,

– la débouter de l’ensemble de ses demandes,

– condamner la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

SUR CE, LA COUR

Faits et procédure

Le 10 mai 2010 a été conclu un accord de branche «portant dispositions spécifiques à l’activité d’optimisation linéaire» entre trois organisations syndicales de salariés, la fédération Communication Conseil Culture Cfdt (F3C Cfdt), la fédération commerce, service, force de vente (Cftc-Csfv) et la fédération nationale de l’encadrement du commerce et des services (Fnecs Cfe-Cgc) d’une part et deux organisations patronales, le syndicat national des prestataires de services d’accueil, d’animation et de promotion (Snpa) et le syndicat national des organisateurs et réalisateurs d’actions promotionnelles et commerciales (Sorap) d’autre part.

Cet accord a fait l’objet d’un arrêté d’extension le 19 décembre 2011.

Le 30 octobre 2012, la fédération des employés et cadres force ouvrière (Fec Fo) a adhéré à cet accord.

Par arrêt du 14 mai 2014, le Conseil d’État a sursis à statuer sur le recours pour excès de pouvoir formé le 22 février 2012 par la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention contre l’arrêté d’extension précité jusqu’à ce que l’autorité judiciaire se soit prononcée sur la question préjudicielle portant sur la validité de cet accord en ce qu’il a instauré un contrat d’intervention à durée déterminée d’optimisation linéaire qui méconnaît les dispositions des articles L.1242-1 et L.1242-2 3° du code du travail.

C’est dans ces conditions que la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention, non-signataire et non adhérent de l’accord de branche étendu du 10 mai 2010, a notamment assigné les parties intimées devant le tribunal de grande instance de Paris afin d’en voir prononcer l’annulation.

Motivation

Sur les demandes de la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention :

Selon l’article L.1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

L’article L.1242-2 du même code dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l’article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d’un salarié (1°), l’accroissement temporaire d’activité (2°) et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois(3°).

Selon les pièces versées aux débats, à savoir le procès-verbal de la commission mixte paritaire du 13 octobre 2009 et celui de la commission sur le merchandising du 3 novembre 2009, l’optimisation linéaire est définie comme une activité ponctuelle, s’agissant du montage des têtes de gondole, des inventaires, de l’assistance pour les linéaires (ou action anti-rupture) confiées à des sociétés prestataire de service.

L”accord du 10 mai 2010 relatif à l’activité d’optimisation de linéaires prévoit en son préambule :

‘Les dispositions du présent accord ne sont applicables qu’aux salariés ayant été spécifiquement engagés aux fins d’exercer leur prestation de travail dans le cadre d’une activité d’optimisation linéaire définie ci-après.

La prestation d’optimisation linéaire consiste essentiellement dans des actions par nature ponctuelles et temporaires de montage de têtes de gondole, d’activités d’inventaires, des implantations, de l’assistance pour les linéaires mais également pour des actions anti-rupture (encore appelées vigilance sur les linéaires)

Ces activités se déroulent autour d’actions temporaires, limitées dans le temps, exclusivement liées à l’actualité ou la saisonnalité des ventes des clients, exercées de façon très ponctuelle, obligeant les organisateurs afin de répondre au besoin du client dans le respect des droits des salariés, à un aménagement et une organisation du travail dans les limites et les garanties fixées par la loi.

Sont par ailleurs expressément exclus de cet accord les salariés affectés à des postes correspondant à des actions permanentes de remplissage de linéaire et de réapprovisionnement de rayons.

Sont enfin exclus de cet accord les salariés affectés à des postes correspondant à des actions dont l’objet unique est la pose de Plv et les relevés de linéaires qualitatifs et quantitatifs.

Les partenaires sociaux souhaitent dans le cadre du présent accord sécuriser les règles propres à cette activité et assurer des garanties réelles au salarié’.

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention

se prévaut d’un arrêt de la Cour de cassation en date du 30 mars 2011 ayant annulé l’accord du 11 décembre 2007, puis fait en outre valoir que cet accord constitue une violation :

– des dispositions de la convention 158 de l’organisation internationale du travail (Oit),

– de la directive 1999/70 CE du 28 juin 1999,

– de l’article L.1242-1 et de l’article L.1242-2 du code du travail,

et enfin qu’il contient des dispositions léonines et créatrices d’inégalité de traitement.

– Sur l’analogie entre la situation actuelle et celle objet de l’arrêt du 30 mars 2011

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention se prévaut de l’arrêt rendu le 30 mars 2011 par la Cour de cassation qui a rejeté le pourvoi formé par le Snpa et le Sorap contre un arrêt de cette cour ayant annulé l’accord du 11 décembre 2007.

Force est de constater que cette annulation sanctionne l’accord du 11 décembre 2007 prévoyant un mécanisme de rupture des contrats de travail existants préalablement à l’entrée en vigueur de l’accord relatif à l’animation commerciale par voie de novation des contrats de travail à durée indéterminée en contrats de travail à durée déterminée et qu’il n’existe aucune analogie avec l’objet de l’accord du 10 mai 2010, les intimés faisant observer à juste titre que l’accord du 13 février 2006 prévoyant le recours au contrat de travail à durée déterminée n’a quant à lui pas été annulé.

– Sur la violation de la convention n° 158 de l’Oit :

Il est précisé à l’article 2 de la convention n° 158 de l’Oit qui s’applique à toutes branches d’activité économique et à tous les travailleurs salariés, en ses alinéas 2 et 3 que :

‘2. Un membre pourra exclure du champ d’application de l’ensemble ou de certaines des dispositions de la présente convention les catégories suivantes de travailleurs salariés :

a) les travailleurs engagés aux termes d’un contrat de travail portant sur une période déterminée ou une tâche déterminée ;

b) les travailleurs effectuant une période d’essai [‘];

c) les travailleurs engagés à titre occasionnel pour une courte durée.

3. Des garanties adéquates seront prévues contre le recours à des contrats de travail à durée déterminée visant à éluder la protection découlant de la présente convention’.

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention fait valoir que l’accord du 10 mai 2010 est contraire à ces dispositions en ce qu’il vise à éluder les droits des salariés en matière de licenciement.

Elle indique qu’aux termes des dispositions de l’article 12.1, si l’employeur a l’obligation de proposer au salarié un contrat d’intervention à durée déterminée (cidd), la signature d’un contrat de travail intermittent est enfermée dans des conditions particulièrement restrictives à savoir que ‘le nombre d’heures travaillées se calcule sur les 12 derniers mois et est au moins égal à 500 heures’, que la proposition doit être faite par l’employeur dans les deux mois suivant la réalisation de ces conditions, le salarié disposant de 15 jours calendaires à compter de la date de la première présentation de la proposition pour l’accepter ou la refuser, que son absence de réponse est assimilée à un refus, qui, qu’il soit implicite ou explicite, ne lui permet plus d’exiger l’accès au contrat de travail intermittent avant une nouvelle période de 12 mois, et enfin que la proposition doit déboucher sur un contrat de travail intermittent prenant effet au plus tard dans le mois suivant la fin du délai de 2 mois susvisé.

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention soutient que

– le salarie embauché en cidd ne dispose pas de la moindre garantie en matière de licenciement durant les douze premiers mois de son embauche,

– les garanties ne lui sont offertes qu’à des conditions restrictives et cumulatives,

– le salarié qui remplit les conditions requises peut être amené à travailler au total 15 mois en contrat de travail à durée déterminée avant de bénéficier d’un contrat de travail à durée indéterminée intermittent (12 mois + 2 mois pour la proposition de contrat de travail à durée indéterminée + 1 mois pour la signature),

– il peut en raison de son silence être amené à perdre son droit à contrat de travail à durée indéterminée et donc ses droits en matière de licenciement durant une période de 12 mois qui ajoutée à la première période de 12 mois aboutit à un emploi durant 27 mois en contrat de travail à durée déterminée (première période de 12 mois + nouvelle période de 12 mois + 2 mois pour la nouvelle proposition + 1 mois pour la signature du contrat de travail à durée indéterminée),

– le salarié ‘est nécessairement tenté de renoncer volontairement et par avance à ses droits en matière de licenciement afin de bénéficier en contrepartie d’une indemnité de précarité et d’une prise en charge par Pôle emploi».

Le Snpa et le Sorap contestent que l’accord du 10 mai 2010 ait pour finalité d’éluder les droits du salarié en matière de licenciement et qu’il soit nécessaire d’effectuer des contrats de travail à durée déterminée durant une période de quinze mois pour bénéficier d’un contrat de travail à durée indéterminée intermittent, soulignant que l’exigence pour le salarié d’effectuer au moins 500 heures sur les douze derniers mois, équivaut à réaliser l’équivalent de 3 mois de travail effectif à temps plein.

Ils font valoir que conformément aux dispositions de la convention n°158 de l’Oit qui n’exclut

pas le recours aux contrats de travail à durée déterminée, la France a mis en ‘uvre des garanties adéquates, et que de plus l’article 1 de l’accord rappelle également que le cidd d’optimisation linaire est spécifique au type d’emploi concerné.

En effet il y est expressément indiqué que ‘le contrat d’intervention à durée déterminée d’optimisation linéaire est un contrat de travail à durée déterminée conclu spécifiquement pour pourvoir un emploi temporaire d’un salarié affecté à une action d’optimisation de linéaire en application de l’article L.1242-2-3° du code du travail’ et qu’il ‘est soumis aux conditions exposées dans le présent texte, établi dans le cadre des lois et règlements en vigueur, et notamment les articles L.1242-2 et D.1242-1 du code du travail’.

Par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats que l’emploi a une nature nécessairement provisoire dès lors que les prestations réalisées par des entreprises spécialisées n’ont pas pour but d’assurer une prestation permanente de réapprovisionnement des rayons réalisée par le personnel des enseignes mais d’effectuer des missions spécifiques, sur de courtes périodes, correspondant le plus souvent à des pics d’activité tenant à la saisonnalité.

Eu égard à cette spécificité et au caractère ponctuel des opérations confiées par les clients aux entreprises d’optimisation de linéaire, les emplois concernés n’ont pas pour finalité de pourvoir un emploi permanent au sein de ces entreprises.

S’agissant des garanties mises en ‘uvre, le tribunal rappelle avec pertinence que le délai de carence de l’article L.1244-4-3 du code du travail n’est pas applicable aux contrats de travail à durée déterminée conclu pour pourvoir un emploi à caractère saisonnier pour lesquels dans certains secteurs, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et de son caractère par nature temporaire comme en l’espèce.

En tout état de cause, l’accord précise en son article 8 «Succession de contrats de travail à durée déterminée d’optimisation de linéaires avec le même salarié» : ‘Entre les contrats d’intervention, il n’y a pas de délai de carence, sauf si la durée totale des contrats successifs sans délai dépasse 4 mois consécutifs, auquel cas le délai de carence légal d’un tiers de la durée des contrats successifs précités s’impose à nouveau sur la durée cumulée des contrats qui se sont succédé, et ce avant la signature d’une nouvelle série de contrats. Auquel cas, le délai de carence s’impose à nouveau sur la totalité de la durée cumulée des contrats qui se sont succédé, et ce avant la signature d’une nouvelle série de contrats’.

Vainement la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention prétend que ce dispositif n’offre pas de garantie pour le salarié dés lors que, et quand bien même il n’est pas fixé de durée maximale d’emploi, l’employeur a l’obligation de proposer un contrat intermittent à durée indéterminée au salarié embauché en contrat de travail à durée déterminée ayant travaillé au moins 500 heures sur les douze derniers mois, ce qui a pour effet de limiter de facto la possibilité de recours à des contrats de travail à durée déterminée

Par ailleurs, et contrairement à ce que soutient l’appelante, les termes de l’accord ne peuvent s’interpréter comme valant incitation pour les salariés de renoncer volontairement et par avance à leurs droits en matière de licenciement, l’article 9 prévoyant un dispositif de protection spécifique du salarié lui assurant le bénéfice d’une indemnité de précarité (exclue en cas de contrat de travail à durée déterminée à caractère saisonnier aux termes de l’article L.1243-10 1°) ainsi que de l’ancienneté acquise à compter de la signature du premier contrat de travail à durée déterminée.

Il existe bien dans l’accord du 10 mai 2010 des règles propres à l’activité d’optimisation linéaire assurant des garanties réelles et adéquates propres à assurer la protection du salarié telle que voulue par la convention n° 158 de l’Oit.

– Sur la violation de la directive 1999/70 CE du 28 juin 1999

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention fait valoir que l’existence d’un accord collectif prévoyant que certains emplois pourront être pourvus au moyen de contrats de travail à durée déterminée successifs en raison de l’usage constant de recourir à ce type de contrat n’exclut pas de vérifier, en application de la directive 1999/70 CE du 28 juin 1999 et de l’accord-cadre du 18 mars 1999, que le recours à l’utilisation de contrats de travail à durée déterminée successifs doit être justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi, qu’en l’espèce aucune raison objective ne justifie le recours au contrat de travail à durée déterminée afin de pourvoir des emplois relatifs à des prestations d’optimisation de linéaires, et enfin que les prestations ne sont temporaires que ‘pour les clients des sociétés d’actions commerciales terrain’, ces prestations pouvant être fournies toute l’année.

Il a été rappelé précédemment que le préambule mentionne expressément que l’activité d’optimisation temporaire se déroule autour d’actions limitées dans le temps, exclusivement liées à la saisonnabilité des ventes, exercées de façon très ponctuelle, impliquant une organisation spécifique du travail.

Les entreprises concernées doivent répondre aux demandes des clients à l’occasion d’actions commerciales précises, correspondant à certaines périodes de l’année et propres à l’activité développée de sorte que l’accord du 10 mai 2010 permettant le recours à des contrats de travail à durée déterminée successifs, dans le respect des dispositions légales et réglementaires propres à ce type de contrat, est justifié par des raisons objectives tenant au caractère par nature temporaire de l’activité d’optimisation de linéaire, et ne contrevient pas à la directive 1999/70 CE du 28 juin 1999.

– Sur la violation des dispositions de l’article L.1242-1 et L.1242-2 du contrat de travail

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention fait valoir en premier lieu que l’optimisation de linéaires est une activité normale et permanente des entreprises concernées par l’accord litigieux et que le recours à des Cidd est destiné à pourvoir durablement des emplois.

Au regard de ce qui précède c’est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal après avoir relevé que :

– les actions d’organisation linéaire telles que définies dans la convention collective nationale du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire consistent en des actions dont l’objectif est de valoriser la présence, le positionnement et la visibilité des produits ou services du client dans son ou ses réseaux,

– lorsque des opérations de réapprovisionnement de rayons de grandes surfaces ont lieu toute l’année, elles sont exclues du champ de l’accord du 10 mai 2010,

– le champ d’application de l’accord se limite à des actions précisément déterminées dans son préambule,

a jugé que les emplois concernés par l’accord, sont des emplois par nature temporaire.

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention allègue ensuite, s’agissant de l’article L.1242-2 du code du travail, que l’accord du 10 mai 2010 conduit nécessairement à permettre à l’employeur de faire face à un besoin structurel de main d’oeuvre.

Il est établi par la production de documents émanant notamment de la société Cpm, membre du Sorap et de ses registres du personnel des années 2009 et 2010, qu’avant même la conclusion de l’accord, il existait dans le secteur de l’optimisation linéaire, un usage constant de recourir aux contrats de travail à durée déterminée, qu’ainsi sur 28496 contrats de travail conclus en 2009, 28452 l’ont été à durée déterminée et seulement 44 à durée indéterminée, que la société Service Innovation Group a, quant à elle, conclu 27 036 contrats de travail à durée déterminée pour 51 664 heures de travail, ce que, au demeurant, confirment les échanges entre partenaires sociaux réunis au sein de la commission mixte paritaire du 13 octobre 2009 et de la commission restreinte relative à l’optimisation des linéaires du 15 décembre 2009.

Le tribunal souligne à cet égard avec justesse que l’accord ayant été négocié et signé par des organisations syndicales représentatives, l’existence d’un usage constant est présumée, la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention n’apportant pas la preuve contraire.

Le fait que la nature de l’activité implique une organisation du travail privilégiant un recours majoritaire à des contrats de travail à durée déterminée ne permet pas d’en déduire, ainsi que le prétend l’appelante, que cette organisation réponde à des besoins structurels alors même que le caractère par nature temporaire des emplois est établi.

Il en est de même concernant le fait que, ainsi que le permet l’article 12 de l’accord, les mêmes postes soient pourvus au moyen de contrats de travail à durée déterminée ou de contrats de travail à durée indéterminée intermittents prévus par les articles L.3123-31 et suivants du code du travail.

En effet ces contrats qui sont nécessairement des contrats de travail à durée indéterminée écrits ont pour finalité et de permettre une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées et sont expressément réservés à certains secteurs connaissant des fluctuations d’activité à l’instar de celui de l’optimisation de linéaire.

Le moyen selon lequel il existerait une ‘contradiction juridique patente au sein de l’accord litigieux du 10 mai 2010″ est dès lors inopérant.

– Sur l’existence de dispositions léonines ou créatrices d’inégalité de traitement

La fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention estime que l’accord du 10 mai 2010 contient des dispositions léonines et créatrices d’inégalité de traitement au motif que l’article 13 prévoit une possibilité d’embauche en contrat de travail à durée indéterminée intermittent pour les salariés en contrat de travail à durée déterminée ayant réalisés plus de 500 heures pendant 12 mois.

Cependant, les différences de traitement entre salariés ne se trouvant pas dans la même situation au regard de la durée de travail accomplie opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, preuve que l’appelante ne rapporte pas en l’espèce.’

En tout état de cause, il n’est pas contestable que ce dispositif est destiné, ainsi que cela est rappelé dans le préambule, à sécuriser les règles propres à l’activité concernée et à assurer des garanties réelles au salarié assurant un emploi par nature temporaire et que la différence de traitement qui est ainsi créée est justifiée par des critères objectifs, offrir à tous les salariés remplissant les conditions cumulatives exigées à l’article 12.1 de l’accord la possibilité de solliciter un contrat de travail à durée indéterminée intermittent, et étrangers à toute discrimination au regard du temps de travail accompli.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention de sa demande d’annulation de l’accord du 10 mai 2010.

Sur la demande reconventionnelle du Snpa et du Sorap :

Les Snpa et Sorap sollicitent la condamnation de la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention au paiement de la somme d’un euro à titre de dommages-intérêts.

Le fait que la Cgt ait participé aux négociations de l’accord sans manifester d’opposition ne saurait la priver de tout droit à contestation ultérieure.

Il convient, confirmant le jugement entrepris, de débouter les deux syndicats de leur demande de dommages-intérêts.

Sur l’article de l’article 700 du code de procédure civile :

L’équité commande de confirmer le jugement en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche il serait inéquitable de laisser à la charge du Snpa et du Sorap, ensemble, et de la F3C Cfdt, les sommes qu’ils ont dû exposer en cause d’appel.

Il leur sera alloué 1 500 € sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Y ajoutant

Condamne à payer la somme de 1 500 € au Snpa et au Sorap ensemble ainsi qu’à la F3C Cfdt en application de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne la fédération nationale Cgt des personnels des sociétés d’études, de conseil et de prévention aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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