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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 15 MAI 2019
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/08969 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B3VJU
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Février 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de CRÉTEIL – RG n° 13/02762
APPELANTE
Madame [U] [K] épouse [H]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Bertrand LAMPIDES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0164
INTIMEE
SA CORSAIR
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Guillaume BORDIER de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020 substituée par Me Camille SPARFEL, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 19 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Fabienne ROUGE, Présidente de chambre
Madame Roselyne NEMOZ-BENILAN, Conseillère
Madame Laurence SINQUIN, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame ROUGE dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.
Greffier lors des débats : Madame Valérie LETOURNEUR
MINISTÈRE PUBLIC
L’affaire a été communiquée au Ministère Public qui a fait connaître son avis.
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
– signé par Madame Fabienne ROUGE, Présidente et par Madame Sylvie FARHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame [U] [K] a été embauchée sous contrat de travail à durée déterminée par la société CORSAIR selon les périodicités et motifs suivants :
– Du 21 juillet 2007 au 31 août 2007 (CDD de saison)
– Du 15 décembre 2007 au 10 janvier 2008 (CDD de saison)
– Du 1 er avril 2008 au 15 avril 2008 (CDD de saison)
– Du 7 juin 2008 au 14 juin 2008 (CDD accroissement temporaire d’activité)
– Du 18 juin 2008 au 15 septembre 2008 (CDD de saison)
– Du 16 septembre 2008 au 30 septembre 2008 (CDD de remplacement)
– Du 15 juin 2009 au 31 août 2009 renouvelé au 15 septembre 2009 (CDD de saison)
– Du 15 décembre 2009 au 31 janvier 2010 (CDD de saison)
– Du 26 juin 2010 au 31 août 2010 (CDD de saison)
La relation contractuelle a pris fin à échéance du terme le 31 août 2010.
Par jugement du 24 février 2017, la formation de départage du Conseil de prud’hommes de Créteil a débouté Madame [K] de l’ensemble de ses demandes, a débouté la société CORSAIR de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et a condamné Madame [K] aux dépens.
Par déclaration en date du 4 juillet 2017, Madame [K] en a interjeté appel.
Par conclusions récapitulatives en date du 29 septembre 2017, auxquelles il convient de se référer pour les moyens, Madame [K] demande à la cour d’infirmer le jugement et de condamner la société CORSAIR à lui verser les sommes suivantes :
– 5.102,58 euros à titre d’indemnité de requalification
-20.410,32euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
-5.102,58 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 510,25 euros au titre des congés payés y afférents ;
– 2.551,29 euros à titre d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ;
– 2.551,29 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;
-28.914,62 euros au titre des rappels de salaire, outre 2.891,46 euros au titre des congés payés y afférents ;
– 3.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens
Par conclusions récapitulatives en date du 1er février 2019 auxquelles il convient de se référer pour les moyens la société CORSAIR demande à la cour de confirmer le jugement
de débouter Madame [K] de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions développées lors de l’audience des débats.
Le ministère public dans ses observations écrites indique que des contrats saisonniers pouvaient être conclus pendant plusieurs saisons consécutives dés lors que les salariés n’étaient pas engagés expressément pour toutes les saisons ni pour toute la durée de la saison. Il appartiendra à la cour de vérifier que les contrats pour accroissement d’activité sont justifiés par un réel accroissement d’activité. Il soutient que les contrats pour remplacement de salarié ne mentionnant que la catégorie PNC devront être requalifiés en contrat à durée indéterminée
L’ordonnance de clôture était rendue le 5 février 2019.
MOTIFS
Sur la requalification
Madame [K] conteste le caractère saisonnier des contrats puisque la société Corsair a une activité tout au long de l’année avec des vols réguliers, et souligne que ces contrats sont reconduits systématiquement. Elle critique l’imprécision des contrats de remplacement, la mention personnel navigant commercial ne permettant pas de connaître la qualification de la personne remplacée. Elle conteste le recours abusif aux contrats à durée déterminée pour accroissement temporaire d’activité.
La SA CORSAIR soutient que l’activité normale et permanente d’une entreprise peut néanmoins justifier le recours aux contrats saisonniers dès lors qu’il peut être démontré que son activité s’accroit de façon cyclique, chaque année à des périodes à peu près fixes correspondant aux périodes d’afflux touristique, ce que les partenaires sociaux ont reconnu, qu’elle a également connu un accroissement d’activité liée à une demande d’affrètement non budgétée dans le programme de vol et que la mention figurant sur les contrats de «’personnel navigant commercial’» correspond à la qualification de l’agent conformément aux dispositions du code des transports et du code de l’aviation civile.
Selon l’article L. 1242-2 du code du travail,« un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :
1° remplacement d’un salarié en cas a) d’absence, b) de passage provisoire à temps partiel conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur, c) de suspension de son contrat de travail, de départ définitif avant la suppression de son poste de travail après consultation du comité d’entreprise ou à défaut des délégués du personnel…
2° accroissement temporaire de l’activité
3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois…
L’article L1244-1 précise que les dispositions de l’article L 1243-11 ne font pas obstacle à la conclusion de contrats à durée déterminée successifs avec le même salarié s’il est conclu dans les cas suivants : remplacement d’un salarié absent , remplacement d’un salarié dont le contrat de travail est suspendu, emploi à caractère saisonnier ou pour lesquels dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par voire de convention ou d’accord collectif étendu, il est d’ usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois …
L’article L 1245-1 du code du travail dispose qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L 1242-1 à L 1242-4, L 1242-6à L1242-8, L 1242-12 alinéa un , L1243-11 alinéa un ,L 1243-13, L 1244-3 et L1244-4 .
Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé en cas de recours à un contrat à durée déterminée.
Les contrats saisonniers
Sont saisonniers les travaux destinés à se répéter chaque année à date à peu près fixe , en fonction du rythme des saisons et ou des modes de vie collectifs , la distinction entre le travail saisonnier et le simple accroissement d’activité repose sur le caractère régulier prévisible et cyclique du premier, ces variations étant indépendantes de la volonté de l’employeur ou des salariés . Le tourisme est considéré comme une activité saisonnière. Dés lors le fait qu’une compagnie aérienne ait une activité normale et permanente n’exclut pas le recours aux contrats de travail saisonnier, si son activité est accrue du fait de l’accroissement significatif du nombre de passagers chaque année à des dates à peu près fixes, sur des destinations spécifiques. Le recours à des contrats à durée déterminée de saison est en conséquence justifié. Ainsi que l’a constaté le conseil des prud’hommes l’employeur a la faculté de conclure des contrats de travail à durée déterminée avec le même salarié pour pourvoir un emploi saisonnier sans qu’il existe de limite au delà de laquelle les salariés pourraient se prévaloir d’un contrat de travail a durée déterminée .
En l’espèce
Les contrats saisonniers signés correspondent aux périodes de plus forte affluence touristique soit entre le 15 décembre et le 15 avril puis entre le 15 juin et le 15 septembre, ils ne couvrent pas toute la durée de la saison et ne sont pas conclus systématiquement pour chaque saison avec le même salarié . Le recours à des contrats saisonniers est dés lors justifié
Les contrats pour accroissement d’activité
Une entreprise peut embaucher des salariés par contrat de travail à durée déterminée lorsqu’elle doit faire face à un accroissement temporaire de son activité habituelle Il est nécessaire que la société démontre la réalité de cette augmentation d’activité .
En l’espèce la société CORSAIR justifie que le recours à de tels contrats était fondé par la demande d’affrètement pour le compte de Royal Air Maroc, non budgétée dans le programme de vols pour la période de juin 2008.
Les contrats de remplacement
La catégorie ‘personnel naviguant commercial ‘comporte plusieurs qualifications HST , Chef de cabine et chef de cabine principal dont les fonctions sont différentes et qui perçoivent des rémunérations différentes.
Les contrats de remplacement ne portent que la mention de la catégorie de ‘ personnel navigant commercial’ ce qui ne permet pas à Madame [K] de connaître la qualification précise du salarié remplacé. Faute de respecter cette obligation de précision qui implique nécessairement le nom et la qualification du salarié remplacé, le recours au contrat à durée déterminée n’est pas justifié.
Dés lors les contrats à durée déterminée conclus sur ce motifs sont irréguliers. L’unique contrat de remplacement de Madame [K] a été signé le 16 septembre 2008. Il convient donc de requalifier la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 septembre 2008.
Sur la demande d’indemnité de requalification
L”article L. 1245-2 du code du travail prévoit que l’indemnité de requalification est au moins égale à 1 mois de salaire.
Elle ne peut en effet pas être inférieure au dernier salaire mensuel perçu avant la saisine du juge par Madame [K] s’élève à 2691,63€.
Il convient de condamner la société CORSAIR à lui verser cette somme.
Sur les demandes indemnitaires consécutives à la rupture du contrat de travail
La relation de travail a pris fin le 31 août 2010, les contrats de travail étant requalifiés en contrat à durée indéterminée ,cette rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit aux indemnités de rupture constituées de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés, de l’indemnité conventionnelle de licenciement et d’une indemnité réparant le préjudice résultant du licenciement prévu par l’article L 1235-3 du code Madame [K] ayant une ancienneté de plus de 2 ans.
Le salaire mensuel brut de référence de Madame [K] sera fixée à la somme de 2539,62€ .
Sur l’indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents
Selon |’article L. 1234-5 du Code du travail, lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
L’indemnité compensatrice de préavis due au salarié en application de l’article L. 1234-5 du Code du travail est égale au salaire brut, assujetti au paiement des cotisations sociales, que le salarié aurait perçu s’il avait travaillé pendant Ia duré du délai-congé. Ce salaire englobe tous 1es éléments de rémunération auxquels le salarié aurait pu prétendre s’il avait exécuté normalement son préavis, à 1’exclusion des sommes représentant des remboursements de frais.
L’article 8.3 de l’accord AEPNC signé le 2 septembre 2005 prévoit une durée de préavis de deux mois.
En l’espèce, il convient d’accorder à Madame [K], une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 5.079,24 euros, outre la somme de 507,92€ au titre des congés payés afférents.
Sur l’indemnité de licenciement
Aux termes de l’article L. 1234-9 du Code du travail, le salarié titulaire d’un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait avant la rupture du contrat de travail.
Selon les dispositions de I’article R.423-1du code de l’aviation civile, l’indemnité de licenciement qui est allouée, en application de l’article L. 423-1, sauf en cas de faute grave, au personnel licencié sans droit à pension à jouissance immédiate.
En l’espèce, le salaire mensuel minimum garanti de Madame [K] était de 1612,33euros bruts. I1 convient de lui accorder une indemnité de licenciement d’un montant de 1168,94euros, conformément au calcul établi en subsidiaire par la société CORSAIR
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Aux termes de l’article L. 1235-3 du Code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse l’employeur doit être condamné à réparer le préjudice subi dont le montant ne peut être inférieur aux 6 derniers mois de salaire. Il convient d’allouer à Madame [K] au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de15 5000€ ,au vu des éléments versés aux débats , celle-ci ayant plus de 2 ans d’ancienneté .
Sur la demande fondée sur le non respect de la procédure
Madame [K] ne démontre aucun préjudice spécifique lié au non respect de la procédure , elle sera déboutée de cette demande.
Sur la demande relative rappel de salaire pour les périodes intermédiaires et les congés payés afférents
Le nouvel article L.3245-1 du Code du travail dispose que :
« L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat »
Toute demande en paiement des périodes inter contrats antérieure au 13 août 2010 est prescrite et il appartient au salarié de démontrer qu’il était à la disposition de son employeur pendant les périodes non travaillées .
Madame [K] n’apporte aucun élément permettant de justifier qu’elle s’est tenue à la disposition de son employeur pendant ces périodes intersticielles.
Le jugement qui l’a déboutée de cette demande sera confirmé.
PAR CES MOTIFS
Requalifie la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 septembre 2008
Infirme le jugement du conseil des prud’hommes
condamne la société CORSAIR à payer à Madame [K] les sommes de :
-2691,63€ au titre de l’indemnité de requalification
– 5079,24euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ,
-507,92€ au titre des congés payés afférents.
-1168,94 euros, au titre de l’indemnité de licenciement
– 15500€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
DEBOUTE les parties du surplus des demandes ,
Vu l’article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE la société CORSAIR à payer à Madame [K] en cause d’appel la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge de la société CORSAIR
LE GREFFIER LE PRESIDENT
‘PHMAILOBJET-298’
‘PHMAILTEXTE-299’