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SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 novembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. FROUIN, président
Décision n° 11141 F
Pourvoi n° V 16-15.745
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Jawad X…, domicilié […] ,
contre l’arrêt rendu le 23 février 2016 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l’opposant à la société Demos, société anonyme, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 3 octobre 2017, où étaient présents : M. Frouin, président, M. Y…, conseiller rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. X…, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Demos ;
Sur le rapport de M. Y…, conseiller, l’avis de M. Z…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X…
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté M. Jawad X… de ses demandes tendant au paiement d’un rappel de salaire, des congés payés afférents, d’un rappel d’abonnement aux transports en commun, d’un rappel d’indemnité de congés payés, d’une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, d’une indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’une indemnité pour travail dissimulé ainsi qu’à la régularisation des cotisations sociales salariales et patronales et à la remise de documents sociaux.
AUX MOTIFS QU’aux termes de l’article L.8221-6 du code du travail, “sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription : 1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés […]” ; que toutefois, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée ; qu’il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération ; que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’en l’absence d’apparence d’un contrat de travail, c’est à celui qui invoque son existence d’en établir la preuve ; qu’en l’espèce, M. X… est intervenu en qualité de prestataire de service auprès de la société Demos ; qu’il soutient que sa relation de travail fait ressortir les trois éléments caractérisant un rapport salarial, à savoir la fourniture d’une prestation travail, le paiement d’une rémunération et l’existence d’un lien de subordination ; que les deux premiers éléments ne soulèvent pas de difficulté particulière en l’espèce, le salarié ayant animé des sessions de formation auprès des clients de la société Demos en tant que formateur et produisant les notes d’honoraires correspondantes visant la société Demos ; qu’en revanche, la société Demos conteste l’existence d’un lien de subordination et soutient que M. X… avait la qualité de prestataire de service dans le cadre d’une structure indépendante ; qu’il ressort des pièces versées au débat qu’une présomption de non salariat existe à l’égard de M. X…, prestataire de service immatriculé au registre du commerce de Casablanca sous la société Cre Management en qualité de cogérant “autorisé à gérer, signer ou administrer la société” ; que de même, il se désigne en tant que “profession libérale” sur le certificat d’identification au répertoire national des entreprises et de leurs établissements et a établi d’initiative ses propres factures à la société Demos, de façon continue, ainsi que cela résulte des bordereaux indiquant l’état de facturation des honoraires porté au Grand livre auxiliaire ou encore de la facture de Capital Management du 12 juillet 2007 n° FC 200731 ; que la pratique de l’escompte avec la société Demos atteste également de la nature commerciale de la relation entre les deux entités, ainsi que le démontre un courriel du 21 octobre 2009 ; que de plus, il ressort des éléments versés au débat que M. X… se présente à tous comme consultant “General Manager” au sein de la société Core Management ; qu’il n’apparaît donc pas pour les tiers comme salarié de la société Demos, mais seulement comme simple intervenant auprès d’elle ; que le procès-verbal de constat établi par huissier le démontre par l’intermédiaire de moteurs de recherche sur internet et du curriculum vitae de M. X… ; que la signature de ses courriels ne le présente pas non plus comme étant en collaboration avec Demos mais comme « General Manager » ; que l’attestation contradictoire de M. Raymond A…, associé de la société Core Management n’a pas de valeur probante en ce qu’il affirme que « l’identification de M. X… comme directeur général n’a aucun caractère juridique formel. Ce choix procède d’une décision politique commerciale » ; que s’agissant de l’existence d’un lien de subordination invoqué par M. X… : en premier lieu, l’intéressé soutient que la société Demos lui donnait des ordres et directives ; qu’il se réfère principalement au “Manuel intervenant” daté de février 2007 ; que si ce manuel fait effectivement ressortir des ordres et directives sur le déroulement de la formation, ceux-ci ont seulement pour objectif de le conformer à la réglementation en vigueur et aux exigences minimales qu’un donneur d’ordre est en droit de formuler auprès de son prestataire ; qu’il s’agit principalement d’avoir une présentation soignée, un sens de l’accueil des stagiaires et des supports de formation pédagogiques ; que les corrections d’exercice mises à sa charge s’intègrent nécessairement à la validation de la formation des stagiaires ; que l’ensemble de ces exigences, indispensables à l’activité exercée, reflètent la volonté d’organisation de la société Demos afin d’assurer une formation de qualité, qu’elle est en droit de demander en tant que donneur d’ordres ; qu’en revanche, M. X… restait libre d’adapter les supports de formation selon ses souhaits, de les améliorer ou de formuler des propositions ; que de même, le prestataire ne démontre pas avoir été lié par le respect d’horaires stricts ; qu’il était au contraire autonome ; que des plannings prévisionnels lui étaient communiqués plus de six mois à l’avance sous réserve de modification ; qu’il ressort de plusieurs échanges entre les parties que M. X… restait libre d’accepter les formations, de proposer ses dates, de modifier des formations prévues, ou encore de définir sa période d’absence, comme le témoignent les courriels suivants : – un courriel du 6 juin 2007 de la chargée de projet Intra sur mesure affirmant “j’ai eu Jawad, pour les dates il pense que c’est un peu juste, il est absent de mi-juillet à fin août”, – un courriel du 24 juin 2009 de la secrétaire commerciale de la société Demos lui indiquant “voici le planning 2010 que nous vous proposons “, – un courriel du 2 juillet 2009 de M. X… répondant à la secrétaire commerciale qui lui proposait de nouvelles dates pour le stage “j’ai regardé mon agenda et tout est OK de mon côté “, – un courriel du 9 juillet 2009 de la secrétaire commerciale lui demandant “si vous êtes disposition à cette date, n ‘hésitez pas à me le confirmer “, – un courriel du 22 septembre 2009 de la secrétaire commerciale l’interrogeant “est-il possible de garder les dates jusqu’à jeudi ?”, – un courriel du 24 novembre 2009 de la Responsable Développement Interentreprises lui répondant “je vous remercie d’avoir accepté d’animer le 4 décembre” ou encore “je vous libère les 1er et 2 décembre comme vous me l’avez gentiment proposé” ; qu’en deuxième lieu, M. X… ne parvient pas non plus à démontrer que la société Demos contrôlait l’exécution de sa prestation ; que si une obligation de non sollicitation de clientèle de la société Demos pesait sur M. X… en vertu d’une obligation de loyauté, aucun contrat d’exclusivité n’a été signé entre les parties ; que M. X… a par ailleurs contracté avec d’autres structures de formation ainsi que cela résulte de ses factures et de son courriel du 1er mars 2004 indiquant “je m’aperçois un peu tard que mon document comporte une entête déjà utilisée dans le cadre d’une proposition faite par ailleurs à un organisme concurrent sur des sujets différents” ; qu’en troisième lieu, M. X… ne fournit aucun élément démontrant que la société Demos exerçait à son égard un véritable pouvoir de sanction ; qu’il se réfère à la page 10 du manuel lui indiquant qu’ “une note inférieure à cinq sur un critère concernant directement la qualité de l’animation amène le responsable département à vous demander des explications ” et qu’ “au minimum tous les trois ans, vous serez convié par le responsable de département à un entretien pour effectuer un bilan de vos activités chez nous et envisager de nouvelles perspectives de collaboration. ” ; que ces clauses ne sont qu’un moyen pour la société Demos de s’assurer de la qualité de la prestation rémunérée et de la pérennité sous-jacente de la relation client-fournisseur ; que M. X… ne démontre pas la possibilité pour la société Demos d’exercer un pouvoir de sanction effectif de la société Demos ; qu’il résulte de tout ce qui précède que M. X…, qui exerçait une activité commerciale et qui s’en prévalait à l’égard des tiers, ne démontre pas qu’il se trouvait dans une relation de subordination avec la société Demos, peu important les situations de risque ou de dépendance économique de sa structure, qui sont le propre d’un dirigeant d’entreprise indépendant ; que M. X… se prévaut d’un arrêt de la cour d’appel de Paris du 28 janvier 2015 qui a reconnu que l’une des intervenantes de la société Demos en qualité de formateur expert, devait être considérée comme titulaire d’un contrat de travail ; que néanmoins, au vu des éléments produits au débat, les faits de cette espèce étaient différents ; qu’en effet, la formatrice concernée était d’abord intervenue en tant que salariée vacataire auprès de la société Demos avant d’être recrutée en salariée indépendante, elle travaillait presque à temps plein pour la société et ses horaires étaient précis et unilatéralement fixés par la société ; qu’en conséquence, en l’absence d’un lien de subordination, le jugement du conseil de prud’hommes sera infirmé en ce qu’il a reconnu l’existence d’un contrat de travail et a condamné la société Demos au paiement des sommes à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d’indemnité de licenciement et d’indemnité pour travail dissimulé ; que M. X… sera débouté de toutes ses demandes formées en cause d’appel qui sont liées à l’existence d’un contrat de travail qui n’est pas établi en l’espèce.
ALORS QUE le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que la société Demos donnait des ordres et directives à M. Jawad X…, à qui elle communiquait ses plannings, qu’elle le notait, et qu’elle se réservait la possibilité de le convoquer à des entretiens et de lui demander des explications en cas de note inférieure à 5 ; qu’en écartant l’existence d’un lien de subordination en l’état de ces constatations dont il résultait que la société Demos avait le pouvoir de donner des ordres et des directives à M. Jawad X…, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de M. Jawad X…, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1221-1 et L. 1221-3 du code du travail.
ET ALORS QUE M. Jawad X… démontrait de surcroît qu’il travaillait en intégration dans un service organisé, dans les locaux de la société Demos ou dans ceux désignés par elle, et que cette dernière lui fournissait le matériel nécessaire à l’exécution de son travail et lui imposait les horaires et les modalités de son travail; qu’en laissant sans réponse ce moyen d’autant plus déterminant qu’elle avait par ailleurs constaté l’existence d’ordres et de directives et d’un contrôle de l’exécution de ces directives, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.
ALORS encore QU’ en retenant qu’il ressort des pièces versées au débat qu’une présomption de non salariat existe à l’égard de M. X…, prestataire de service immatriculé au registre du commerce de Casablanca sous la société Cre Management en qualité de cogérant “autorisé à gérer, signer ou administrer la société” sans examiner l’argumentation de M. X… qui soutenait d’une part qu’il avait travaillé d’octobre 2003 à juin 2004 via une société de portage, puis de juillet 2004 à mars 2005 directement pour Demos, enfin, sous la pression de cette société qui ne le payait pas, à compter d’avril 2005 sous le statut fictif de travailleur indépendant, mais non sous couvert d’une société Core, immatriculée au Maroc,et qui produisait le certificat d’immatriculation de la société Core au Maroc seulement en avril 2008 et la preuve de son absence d’activité pendant la période litigieuse, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 1221-3 du code du travail.