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Il résulte de l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 que seules les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par leurs statuts, de combattre le racisme, peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit d’injure publique raciale prévu par l’article 33, alinéa 3, de la loi sur la presse.
Alain Soral, a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, des chefs d’injure publique raciale et de provocation à la haine raciale, à la suite de la publication, sur son compte twitter sous le titre « Cavale à Colmar » et sur le site de l’association « Egalité et Reconciliation » qu’il dirige, d’un article intitulé « xxx était en Alsace ce mardi 4 mai 2010 malgré les pressions », texte accompagné d’une photographie le représentant devant la porte du tribunal de Colmar en train de faire le geste dit « de la quenelle » évoquant, pour certains, un salut nazi inversé.
Ce mouvement était interprété comme un geste de défi à l’égard des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme après la condamnation de l’intéressé du chef de contestation de crime contre l’humanité.
Pour accorder au consistoire israélite du Haut-Rhin une somme de 200 euros à titre de réparation et celle de 1 500 euros en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale, l’arrêt énonce que celui-ci représente le culte juif au sein du département.
Or, seules les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par leurs statuts, de combattre le racisme, peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit d’injure publique raciale prévu par l’article 33, alinéa 3, de la loi sur la presse. En se déterminant ainsi, alors que le consistoire israélite du Haut-Rhin constitue un établissement public à caractère administratif (CE, 13 avril 1964, n° 53965, publié au Recueil Lebon), la cour d’appel a méconnu l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
N° E 21-80.611 F-D
N° 00060
CK
18 JANVIER 2022
CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI
M. SOULARD président,
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 18 JANVIER 2022
M. [V] [Z] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 6 janvier 2021, qui, pour injure publique à raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion en récidive, l’a condamné à cinquante jours-amende à 150 euros, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire personnel et des mémoires en défense ont été produits, et des observations complémentaires ont été formulées par le demandeur.
Sur le rapport de Mme Ménotti, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de l’association [1], partie civile, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de l’association Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, partie civile, et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l’audience publique du 7 décembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Ménotti, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [Z] dit [U] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, des chefs d’injure publique raciale et de provocation à la haine raciale, à la suite de la publication, sur son compte twitter sous le titre « Cavale à Colmar » et sur le site de l’association « Egalité et Reconciliation » qu’il dirige, d’un article intitulé « [V] [U] était en Alsace ce mardi 4 mai 2010 malgré les pressions », texte accompagné d’une photographie le représentant devant la porte du tribunal de Colmar en train de faire le geste dit « de la quenelle » évoquant, pour certains, un salut nazi inversé. Ce mouvement était interprété comme un geste de défi à l’égard des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme qui, après la condamnation de M. [Z] du chef de contestation de crime contre l’humanité, prononcée par le tribunal correctionnel de Paris le 15 avril précédent, à un an d’emprisonnement assorti d’un mandat d’arrêt, avaient déploré publiquement l’inexécution de ce mandat d’arrêt, ainsi qu’en témoigne le texte publié sur le site « Egalité et Réconciliation » évoquant « le contexte brûlant du mandat d’arrêt » et l’opposition de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) et du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) à la venue de M. [Z] en Alsace.
3. Par jugement du 10 janvier 2020, le tribunal correctionnel de Colmar a relaxé M. [Z] et débouté de leur demande les parties civiles, à savoir les associations LICRA et [1], ainsi que le consistoire israélite du Haut-Rhin.
4. Le ministère public et les parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. Il n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l’arrêt attaqué qui, après avoir déclaré M. [Z] coupable d’injure publique raciale, a déclaré recevable la constitution de partie civile du consistoire israélite du Haut-Rhin, alors que celui-ci n’a pas pour objet de combattre le racisme et ne répond donc pas aux conditions posées par l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881.
Réponse de la Cour
Vu l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 :
7. Il résulte de cet article que seules les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par leurs statuts, de combattre le racisme, peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit d’injure publique raciale prévu par l’article 33, alinéa 3, de la loi sur la presse.
8. Pour accorder au consistoire israélite du Haut-Rhin une somme de 200 euros à titre de réparation et celle de 1 500 euros en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale, l’arrêt énonce que celui-ci représente le culte juif au sein du département.
9. En se déterminant ainsi, alors que le consistoire israélite du Haut-Rhin constitue un établissement public à caractère administratif (CE, 13 avril 1964, n° 53965, publié au Recueil Lebon), la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
10. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d’appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire.
Examen de la demande fondée sur l’article 618-1 du code de procédure pénale
12. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu’il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [Z] du chef d’injure publique raciale étant devenue définitive, par suite de la non-admission du premier moyen de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande formée par les associations LICRA et [1] au titre de l’article 618-1 du code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Colmar, en date du 6 janvier 2021, en ses seules dispositions ayant déclaré recevable la constitution de partie civile du consistoire israélite du Haut-Rhin et accordé à celui-ci des dommages-intérêts, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
DÉCLARE IRRECEVABLE la constitution de partie civile du consistoire israélite du Haut-Rhin ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [V] [Z] devra payer à la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme en application de l’article 618-1 du code de procédure pénale.
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [V] [Z] devra payer à [1] en application de l’article 618-1 du code de procédure pénale.
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit janvier deux mille vingt-deux.