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N° RG 20/01514 – N° Portalis DBVM-V-B7E-KNMW
N° Minute :
C2
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELARL AEGIS
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
Me Anaïs BOURGIER
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 24 MAI 2022
Appel d’un Jugement (N° R.G. 18/03146) rendu par le tribunal judiciaire de VALENCE en date du 18 février 2020, suivant déclaration d’appel du 28 Avril 2020
APPELANT :
M. [S]-[V] [G]
né le 13 mars 1984 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représenté par Me Sandrine CUVIER de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE substitué par Me El Yousfi, postulant, et Me Grégoire LADOUARI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES :
S.A.R.L. DOMAINE EQUESTRE DU MOULIN prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 4]
Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me GARDACH substitué par Me GARY-LAFOSSE, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. GENERALI IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me GARDACH substitué par Me GARY-LAFOSSE, avocat au barreau de BORDEAUX
CPAM DE LA DROME représentée par son mandataire de gestion, la CPAM du PUY-DE-DÔME dont le siège social est [Adresse 5], prise en la personne de son dirigeant légal domicilié audit siège
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Anaïs BOURGIER, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et plaidant par Me Nicolas ROGNERUD substitué par Me CHAUFOUR, vocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Emmanuèle Cardona, Présidente,
Anne-Laure Pliskine, Conseillère,
Frédéric Dumas, vice-président placé, en vertu d’une ordonnance en date du 18 novembre 2021 rendue par la première présidente de la cour d’appel de Grenoble
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 mars 2022
Emmanuèle Cardona, Présidente, entendue en son rapport,
Anne-Laure Pliskine, Conseillère,
Frédéric Dumas, vice-président placé, en vertu d’une ordonnance en date du 18 novembre 2021 rendue par la première présidente de la cour d’appel de Grenoble
Assistés lors des débats de Caroline Bertolo, Greffière
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et Me Gary-Lafosse et Me Chaufour en leurs plaidoiries.
Puis l’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu ce jour.
FAITS ET PROCEDURE
M. [S] [G], titulaire d’une licence auprès de la Fédération Française d’Equitation, fléchage tourisme, a été victime le 12 décembre 2015 d’une grave chute, alors qu’il participait à une leçon de saut d’obstacles au centre équestre Domaine Equestre du Moulin, au sein duquel il pratiquait l’équitation.
Une tétraplégie et des fractures cervicales ont été diagnostiquées.
M. [S] [G] est décédé le 2 août 2016.
Par actes des 18, 20 et 24 septembre 2018, son fils, M. [S]-[V] [G], a fait citer la société Domaine Equestre du Moulin, la compagnie Generali IARD son assureur et la caisse primaire d’assurance maladie de la Drôme, aux fins d’indemnisation des préjudices de la victime directe et de ses préjudices personnels.
Par jugement du 18 février 2020 le tribunal judiciaire de Valence a :
Dit M. [S] [V] [G] recevable à agir au titre de l’action successorale et à titre personnel,
débouté M. [G] de ses demandes,
débouté la caisse primaire d’assurance maladie de ses demandes,
débouté La société Domaine Equestre du Moulin et Generali de leur demande d’article 700 du code de procédure civile,
dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
condamné M. [G] aux dépens.
M. [G] a interjeté appel de la décision par déclaration du 28 avril 2020, en ce qu’il a été débouté de ses demandes et condamné aux dépens, intimant la société Domaine Equestre du Moulin, la société Generali IARD et la caisse primaire d’assurance maladie de la Drôme.
Par écritures du 18 novembre 2021, la caisse primaire d’assurance maladie a formé appel incident, concluant à la réformation du jugement.
Aux termes de ses conclusions n°3, dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs M. [G] demande à la cour de :
Réformer le jugement de première instance en ce qu’il a nié la responsabilité contractuelle de la société Domaine Equestre du Moulin dans l’accident de M. [S] [G]
Condamner solidairement la société Domaine Equestre du Moulin et la compagnie Generali IARD à lui payer les sommes suivantes :
Au titre de l’indemnisation des préjudices de la victime directe
– 200.000 euros au titre des dépenses de santé
– 500 euros au titre des frais divers
– 50.000 euros au titre de la perte de gains professionnels
– 50.000 euros au titre des souffrances endurées
– 297.000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent
– 40.000 euros au titre du préjudice d’agrément
– 10.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent
-50.000 euros au titre du préjudice sexuel
Au titre de l’indemnisation des préjudices personnels de monsieur [S]-[V] [G]
6.000 euros au titre du préjudice moral lié au décès de son père
5.000 euros au titre du préjudice moral lié à l’accompagnement du défunt
Condamner solidairement la société Domaine Equestre du Moulin et la compagnie Generali IARD au paiement à M. [S]-[V] [G] de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamner solidairement la société Domaine Equestre du Moulin et la compagnie Generali IARD aux entiers dépens de l’instance.
Il soutient :
– que la victime était un cavalier occasionnel, sans diplôme particulier,
– que lorsque la chute est survenue, il suivait une leçon, équipé d’une bombe et d’un gilet de protection,
– qu’une tétraplégie complète et des fractures cervicales ont immédiatement été diagnostiquées,
– qu’une expertise judiciaire avait été ordonnée, mais n’a pas pu aboutir,
– que le centre équestre a engagé sa responsabilité contractuelle et qu’il lui appartient de répondre des fautes commises par l’enseignant salarié,
– que ce dernier a manqué à son obligation de prudence et de diligence,
– que les associations sportives proposant la pratique de sports dangereux sont soumises à une obligation de moyen renforcée, appréciée avec plus de rigueur,
– que le tribunal n’a pas tenu compte des manquements flagrants du moniteur, qui n’a pas cherché à adapter la leçon à l’âge et aux capacités de son élève ou au comportement du cheval.
L’appelant détaille ensuite les différents chefs de préjudices dont il demande réparation.
La caisse primaire d’assurance maladie de la Drôme conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a débouté M. [G] et elle-même de leurs prétentions et sollicite la condamnation in solidum de la société Domaine Equestre du Moulin et de la société Generali à payer à la caisse primaire d’assurance maladie du Puy de Dôme, agissant au nom et pour le compte de la caisse primaire d’assurance maladie de la Drôme :
– 809 365,19 euros au titre des débours définitifs, outre intérêts à compter du 19 février 2019 et capitalisation,
– 1 091 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,
– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle sollicite également la condamnation du centre équestre et de son assureur aux dépens.
La société Generali IARD et la société Domaine Equestre du Moulin concluent à la confirmation du jugement et au débouté de M. [G] et de la CPAM.
A titre subsidiaire, elles sollicitent la réduction de l’indemnisation sollicitée au titre des souffrances endurées et la limitation des préjudices moraux de l’appelant à la somme de 10 000 euros.
Elles sollicitent enfin la condamnation de ce dernier à leur payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elles exposent :
– que le centre équestre n’est tenu contractuellement que d’une obligation de moyens, qui impose de rapporter la preuve d’une faute de sa part, dès lors que la victime a un rôle actif,
– qu’au delà du degré de dangerosité du sport, il faut tenir compte du niveau du pratiquant,
– qu’aucun élément de l’espèce ne démontre que le moniteur aurait manqué de prudence,
– que la chute ne suffit pas à démontrer la responsabilité de l’enseignant,
– que M. [G] pratiquait l’équitation sportive et que son cheval, qu’il connaissait bien comme appartenant à sa compagne, était rompu à l’exercice du saut d’obstacle, y compris en compétition,
– que la victime a d’ailleurs réussi par trois fois à franchir les obstacles positionnés pour l’exercice, les chutes n’ayant eu lieu qu’après le franchissement,
– que le cheval ne présentait aucun signe de nervosité et que la victime ne s’est plainte d’aucune difficulté physique,
– que si la responsabilité du centre devait être retenue, il ne saurait être fait droit aux demandes d’indemnisation en l’absence de toute pièce médicale, ou de tout justificatif,
– que l’indemnisation des postes de préjudices post consolidation est exclue, dès lors que seule la date du décès peut être retenue comme date de consolidation.
MOTIFS
Il est renvoyé aux dernières conclusions des parties, en vertu des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, pour le détail de leur argumentation.
Il résulte des dispositions de l’article 1147 du code civil applicable en l’espèce que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée.
Pour débouter M. [G] de ses demandes les premiers juges ont retenu :
– que le club équestre était tenu à une obligation de moyens,
– qu’il appartenait à la victime de rapporter la preuve du manquement à l’obligation de prudence et de diligence,
– que les éléments du dossier ne démontraient pas que le moniteur, M. [L], ait manqué à son obligation de prudence et de diligence.
Cependant, l’équitation est un sport dangereux, qui à ce titre permet de retenir à la charge du club équestre une obligation de moyens renforcée, même si cette obligation doit s’apprécier au regard du niveau du pratiquant, qui conserve un rôle actif.
Il appartient donc au Domaine Equestre du Moulin de démontrer qu’il n’a commis aucune faute et donc que son moniteur M. [L] n’a pas manqué à son obligation de prudence et de diligence, ce qui est bien le cas en l’espèce.
Ainsi, le club démontre l’adaptation des exercices confiés à M. [S] [G] le jour de son accident, à ses capacités physiques et au niveau de celui-ci, qui était titulaire d’une licence d’équitation fléchage cheval depuis au moins 2011 (pièce 6 domaine équestre), transformée en licence fléchage tourisme en 2015 et qui avait participé en octobre 2014 et juin 2015 à des épreuves de TREC en équipe (Techniques de Randonnées Equestres de Compétition).
Il avait d’ailleurs, selon la déclaration de sinistre et les déclarations des témoins de l’accident, réussi à franchir tous les obstacles des exercices, les chutes ne s’étant produites qu’alors que le parcours était terminé, démontrant ainsi l’adaptation des exercices à son niveau et à celui de la monture.
En outre, M. [G] connaissait le cheval qu’il montait, puisqu’il appartenait à sa compagne et aucun élément du dossier ne démontre que M. [L] ait pu être alerté sur une éventuelle difficulté de comportement du cheval, puisque les chutes se sont produites après que cavalier et monture aient réussi les franchissements proposés. Il ne peut donc être soutenu que le cheval ait refusé l’obstacle, puisqu’il les a franchis sans difficulté.
Le club équestre démontre donc que son moniteur n’a pu être alerté ni par le comportement du cheval pendant les exercices, ni par une quelconque doléance de M. [G], qui selon les déclarations de Mme [D] a commenté ses deux premières chutes sur le ton de la plaisanterie.
Si cette attestation ne respecte par les formes prévues par les textes, son contenu n’est pas contesté par l’appelant, qui au contraire se prévaut des déclarations de Mme [Y], dans une attestation également non conforme.
Aucun des éléments produits par l’appelant ne permet donc de démontrer que M. [L] ait pu être alerté par l’état de la victime ou par un état de nervosité ou de dangerosité du cheval le jour de l’accident tel qu’il l’invoque, le forum dont il retranscrit la discussion n’ayant aucune valeur probatoire.
L’ensemble de ces éléments démontrent donc l’absence de manquement du Domaine Equestre du Moulin à ses obligations contractuelles et le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
Condamne M. [S]-[V] [G] à payer aux sociétés Domaine Equestre du Moulin et Generali IARD une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute M. [G] et la caisse primaire d’assurance maladie de leurs demandes,
Condamne M. [S]-[V] [G] aux dépens de la procédure d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,