Your cart is currently empty!
N° 164
SE
————–
Copies exécutoires
délivrées à :
– Me Merceron,
– Me Dubois,
le 12.05.2022.
Copies authentiques
délivrées à :
– Me Lau,
– Cps,
le 12.05.2022.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D’APPEL DE PAPEETE
Chambre Civile
Audience du 12 mai 2022
RG 21/00139 ;
Décision déférée à la Cour : jugement n° 20/00480, rg n° 18/00507 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 14 otobre 2020 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 19 avril 2021 ;
Appelant :
M. [N] [W], né le [Date naissance 4] 1971 à [Localité 9], de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] ;
Représenté par Me James LAU, avocat au barreau de Papeete ;
Intimés :
M. [I] [C], né le [Date naissance 1] 1995 à [Localité 6], de nationalité française, demeurant à [Adresse 7] ;
Ayant pour avocat la Selarl M & H, représentée par Me Muriel MERCERON, avocat au barreau de Papeete ;
La Caisse Meusienne d’Assurances Mutuelles société d’assurances mutuelles à cotisations variables, entreprise régie par le code des assuances dont le siège social est sis [Adresse 3], représentée par la Société AC Assurances Pacifiques, sarl inscrite au Rcs de Papeete sous le n° Tahiti A 27109 dont le siège social est sis [Adresse 2] ;
Ayant pour avocat la Selarl Fenuavocats, représentée par Me Vincent DUBOIS, avocat au barreau de Papeete ;
La Caisse de Prévoyance Sociale de la Polynésie française dont le siège social est [Adresse 10] ;
Ayant conclu ;
Ordonnance de clôture du 21 février 2022 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 24 mars 2022, devant M. SEKKAKI, conseiller faisant fonction de président, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l’ordre judiciaire aux fins d’exercer à la cour d’appel de Papeete en qualité d’assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par M. SEKKAKI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
Faits :
Le 9 octobre 2016, sur la route territoriale RT1 au PK 13,500 au niveau de l’église à [Localité 8], s’est produit un accident de la circulation impliquant un scooter conduit par Monsieur [N] [W], et un véhicule automobile conduit par Monsieur [I] [C]. Monsieur [W] a présenté une fracture ouverte de la jambe gauche et a été transporté à l’hôpital.
Procédure :
Suivant requête enregistrée au greffe le 15 octobre 2018 et acte d’huissier délivré les 13 septembre et 10 octobre 2018, Monsieur [W] a assigné Monsieur [C] et la Caisse de Prévoyance sociale de la Polynésie française (la CPS) devant le tribunal civil de première instance de Papeete aux fins de voir ordonner une expertise médicale et voir fixer une indemnité provisionnelle de 1.000.000 F CFP.
Suivant exploit d’huissier en date du 18 avril 2019, Monsieur [C] a appelé dans la cause la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles, assureur de son véhicule.
Par jugement n° RG 18/00507 – n° Portalis DB36-W-B7C-CLGY en date du 14 octobre 2020, le tribunal civil de première instance de Papeete a :
– déclaré Monsieur [W] seul responsable de l’accident de la circulation survenu le 7 octobre 2016 sur la commune de [Localité 8],
– débouté Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes,
– condamné Monsieur [W] à payer la somme de 180.000 F CFP à Monsieur [C] et la même somme à la société AC Assurances Pacifique sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
– dit que chacune des parties supportera ses propres dépens,
– rejeté les autres ou plus amples demandes.
Le Tribunal a retenu que Monsieur [W] a commis, lors de la man’uvre de dépassement qu’il a réalisée, une faute de nature à exclure en totalité son droit à indemnisation.
Monsieur [W] a relevé appel de ce jugement par requête enregistrée au greffe le 19 avril 2021 et assignations délivrées les 25 juin, 2 et 6 juillet 2021.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 février 2022, et l’affaire fixée à l’audience de plaidoirie du 24 mars 2022.
A l’issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait rendue le 12 mai 2022 par mise à disposition au greffe.
Prétentions et moyens des parties :
Aux termes de sa requête d’appel, Monsieur [W], appelant, demande à la cour d’infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
– déclarer Monsieur [C] seul et entièrement responsable de l’accident de la circulation survenu le 7 octobre 2016,
– dire et juger Monsieur [C] tenu de réparer intégralement les dommages qu’il a subis,
– condamner solidairement Monsieur [C] et la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles à lui payer la somme de 1.000.000 F CFP à titre de provision,
– ordonner une expertise médicale avec la mission habituelle en la matière,
– dire que Monsieur [W] fera l’avance des frais d’expertise.
Monsieur [C], intimé, demande à la cour, par dernières conclusions régulièrement déposées le 18 octobre 2021, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de :
– condamner Monsieur [W] à lui payer la somme de 500.000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,
Subsidiairement,
– dire et juger que la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles sera tenue de le garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,
En tout état de cause,
– condamner Monsieur [W] à lui payer la somme de 200.000 F CFP au titre des frais irrépétibles d’appel ainsi qu’aux dépens, avec distraction au profit de la Selarl M&H.
La Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles, intimée, demande à la cour, par dernières conclusions régulièrement déposées le 15 novembre 2021, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de :
– dire et juger Monsieur [W] exclusivement et intégralement responsable de l’accident survenu le 7 octobre 2016, et par suite personnellement et exclusivement responsable de son propre dommage,
En conséquence,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, sauf en ce qu’il a dit que chacune des parties devrait supporter ses propres dépens,
– débouter Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– le condamner à lui verser la somme de 300.000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, sur le fondement de l’article 1382 du code civil,
– le condamner à lui à verser la somme de 250.000 F CFP au titre des frais irrépétibles en application de l’article 407 du code de procédure civile,
– le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction d’usage au profit de la Selarl Fenuavocats, représentée par Me Vincent DUBOIS.
La CPS, intimée, demande à la cour, par dernières conclusions régulièrement déposées le 15 octobre 2021, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de :
– lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice quant à la responsabilité de Monsieur [W],
Dans l’hypothèse où la responsabilité de Monsieur [C] serait retenue,
– réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
– condamner solidairement Monsieur [C] et la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles à lui rembourser la somme provisoire de 22.974.100 F CFP au titre des prestations servies pour le compte de Monsieur [W],
– prendre acte de ce qu’elle ne s’oppose pas à la mesure d’expertise sollicitée,
– lui donner acte de ses réserves quant à la demande de provision eu égard à la contestation de la responsabilité de l’accident.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la Cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d’appel des parties. L’exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l’article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, sera renvoyé à la motivation ci-après à l’effet d’y répondre.
Motifs de la décision :
1. Sur les responsabilités :
Monsieur [W] fait grief au jugement de n’avoir fait l’analyse que de son propre comportement sans prendre en considération les fautes qu’il impute à Monsieur [C]. Il fait valoir que la man’uvre de dépassement qu’il effectuait avant l’accident n’était pas dangereuse au regard des conditions de circulation ; qu’en effet les véhicules roulaient au ralenti et se trouvaient presqu’à l’arrêt ; qu’il pouvait donc les doubler sans franchir la ligne continue ; qu’il les doublait deux par deux, effectuant par conséquent de brefs dépassements ; qu’il s’assurait à chaque fois qu’il pouvait le faire sans danger. Il souligne qu’il ne peut lui être reproché un dépassement de la ligne continue, qui n’est pas établi, puisque la collision a eu lieu dans sa voie de circulation près de la ligne médiane. Il impute la responsabilité de l’accident à Monsieur [C]. Il indique en effet que c’est au moment où il commençait à se rabattre qu’il a été surpris par la man’uvre du véhicule conduit par ce dernier ; que celui-ci, venant de la droite où il était stationné sur un emplacement réservé aux bus, a rejoint la voie de circulation sans s’assurer qu’il pouvait le faire sans danger, puis a soudainement tourné à gauche, au moment où lui-même arrivait à sa hauteur. Il ajoute que Mme [Y], présente sur les lieux puisqu’elle lui a porté les premiers secours, atteste que le véhicule de Monsieur [C] n’avait pas signalé sa man’uvre par son feu clignotant.
Monsieur [C] conteste toute responsabilité dans l’accident. Il fait valoir que la man’uvre que Monsieur [W] tente de lui imputer à faute ne s’est pas réalisée dans un même mouvement (sortie d’une voie de stationnement située à droite de la voie de circulation puis changement de direction pour tourner à gauche), mais s’est en réalité décomposée en deux temps bien séparés par un temps de circulation dans la file des véhicules présentes sur la voie, chaque man’uvre ayant été réalisée régulièrement. Il soutient que la circonstance qu’il était initialement stationné sur le bas-côté au niveau d’une voie de bus est donc sans incidence dans la survenue de l’accident ; que, pour tourner à gauche, il s’est arrêté, s’est assuré que la voie d’en face était libre, a mis en marche son feu clignotant, puis a démarré, cette man’uvre étant autorisée par les pointillés ajoutés entre les deux voies de circulation à la ligne continue. Il observe que Monsieur [W] a nécessairement franchi la ligne continue pour procéder au dépassement de la file de véhicules compte tenu de la faible largeur de la voie. Il réfute le témoignage de Mme [Y], contestant que cette dernière ait pu être témoin des détails de l’accident. Il fait valoir que les fautes commises par Monsieur [W], qui, selon ses propres déclarations aux services de gendarmerie, effectuait le dépassement de deux véhicules à la fois, sur une portion de route à double sens, délimitée par une ligne continue interdisant cette man’uvre, caractérisent une violation manifeste des obligations légales de conduite ; que ces fautes sont la cause exclusive de l’accident et qu’elles excluent tout droit à indemnisation de leur auteur.
La Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles reprend les moyens développés par son assuré.
La CPS ne fait valoir aucune observation s’agissant des responsabilités et ne forme aucune demande hors l’hypothèse où celle de Monsieur [C] serait retenue.
Sur ce :
L’article 314-4 du Code de la route polynésien dispose que :
« I. – Avant de dépasser, tout conducteur doit s’assurer qu’il peut le faire sans danger.
II. – Il ne peut entreprendre le dépassement d’un véhicule que si :
1° Il a la possibilité de reprendre sa place dans le courant normal de la circulation sans gêner celle-ci ;
2° La vitesse relative des deux véhicules permettra d’effectuer le dépassement dans un temps suffisamment bref ;
3° Il n’est pas lui-même sur le point d’être dépassé.
III. – II doit, en outre, avertir de son intention l’usager qu’il veut dépasser.
IV. – Pour effectuer le dépassement, il doit se déporter suffisamment pour ne pas risquer de heurter l’usager qu’il veut dépasser. Il ne doit pas en tout cas s’en approcher latéralement à moins d’un mètre en agglomération et d’un mètre et demi hors agglomération s’il s’agit d’un véhicule à traction animale, d’un engin à deux ou à trois roues, d’un piéton, d’un cavalier ou d’un animal.
V. – Le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions des II à IV ci-dessus est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe ».
Il résulte du procès-verbal d’audition daté du 7 octobre 2016 que Monsieur [C] a déclaré: ‘Je me suis stationné sur la voie réservée au bus. J’ai vu mon ami qui était de l’autre côté de la chaussée. J’ai mis mon clignotant, j’ai regardé si un véhicule arrivait, et je me suis inséré sur la voie de circulation normale. Une dizaine de mètres après, au moment où j’allais pour traverser l’autre voie de circulation, le scooter m’est rentré dedans. Je suis sûr d’avoir mis le clignotant pour faire comprendre à la voiture qui arrivait en face que j’allais tourner. Je précise que sur cette voie le dépassement n’est pas autorisé’.
Il résulte du procès-verbal d’audition daté du 26 décembre 2016 que Monsieur [W] a déclaré: ‘Je doublais une file de voitures circulant dans le même sens que le mien. Je les doublais deux par deux. Les voitures que je doublais étaient presque à l’arrêt. A un moment, une des voitures que j’étais en train de doubler a tourné à gauche. Je n’ai pas vu qu’elle tournait, je l’ai vu au dernier moment, j’ai essayé de l’éviter, je suis sorti de la route et la voiture m’a percuté (‘) Je ne sais pas si le conducteur avait mis son clignotant, je n’ai pas fait attention’.
Il est donc incontestable que Monsieur [W] effectuait une man’uvre de dépassement du véhicule conduit par Monsieur [C] au moment de l’accident, ce que confirment :
– les points d’impact (aile avant gauche et pare-choc avant arraché pour le véhicule, avant du scooter) ;
– le procès-verbal du 9 octobre 2016 rapportant le transport, constatations et mesures prises au jour de l’accident, qui précise que l’accident s’est produit au centre de la chaussée.
Ces déclarations et constatations établissent par ailleurs que Monsieur [C] avait déjà rejoint la voie normale de circulation lorsque Monsieur [W] a procédé à son dépassement (‘une des voitures que j’étais en train de doubler’). Ce dernier a alors été surpris, comme il l’explique lui-même, par la man’uvre entreprise par Monsieur [C] pour tourner à gauche, et non par une man’uvre antérieure dont il n’a pas fait état et qu’il n’est donc pas pertinent d’analyser.
Le procès-verbal d’accident routier du 7 octobre 2016 précise, s’agissant du lieu de l’accident, qu’à cet endroit la circulation s’effectuait en double sens, délimité par une ligne continue, et que la présence de pointillés sur la bande centrale de la chaussée autorisait le fait de tourner à gauche comme le véhicule conduit par Monsieur [C] l’a fait.
La ligne continue est un élément de signalisation indiquant que, sur le tronçon de route sur lequel elle est positionnée, les conditions de circulation sont dangereuses. Elle interdit tout franchissement ou chevauchement.
Dans ces conditions, c’est à bon droit que le premier juge a retenu que Monsieur [W] a opéré une man’uvre dangereuse en procédant à un dépassement :
– en présence d’une ligne continue,
– de plusieurs véhicules ‘presque à l’arrêt’ et ‘deux par deux’, ce qui excluait que le dépassement s’effectue en un temps bref, mais également que Monsieur [W] soit assuré de pouvoir reprendre sa place dans le courant normal de la circulation sans gêner celle-ci,
– à l’approche de pointillés sur la bande centrale de la chaussée, lesquels marquaient la probabilité, d’autant plus élevée que la circulation était quasi statique, qu’un véhicule opère un changement de direction.
A cet égard la circonstance que Monsieur [W] n’a, comme il le soutient, pas franchi la ligne continue, est indifférente.
Tout d’abord les circonstances ci-dessus suffisent à établir la dangerosité du dépassement, même en l’absence de franchissement de la ligne continue.
En particulier, il est rappelé que tout conducteur s’apprêtant à quitter une route sur sa gauche doit serrer à gauche, ce qui rend un dépassement par un deux roues, à l’approche d’une signalisation permettant de tourner à gauche, particulièrement dangereux, même si ce dernier ne franchit pas la ligne continue.
Ensuite comme le relève à juste titre le premier juge, la faible largeur de la chaussée telle qu’elle apparaît des clichés photographiques de la gendarmerie impliquait nécessairement, soit que Monsieur [W] franchisse la ligne continue pour doubler le véhicule de Monsieur [C] en toute sécurité, soit qu’il ne la franchisse pas et double alors sans s’être déporté suffisamment.
Enfin, la preuve du non-franchissement de la ligne continue, qu’il appartient à Monsieur [W] d’établir, n’est pas rapportée en l’espèce. En effet, le point d’impact entre les deux véhicules, tel qu’il apparaît de ces mêmes clichés photographiques établis par la gendarmerie, contrairement à la lecture qu’en fait Monsieur [W], confirme la dangerosité du dépassement réalisé compte tenu, particulièrement, de la faible largeur des voies sur ce tronçon.
Par ailleurs, c’est également à bon droit que le premier juge a retenu que :
– Monsieur [W] ne peut en toute hypothèse se prévaloir du fait que Monsieur [C] se serait brutalement déporté vers la gauche alors que ce dernier a mentionné dans ses déclarations qu’il avait actionné son clignotant et que Monsieur [W] a reconnu lui-même ne pas avoir été attentif à ce point (‘Je ne sais pas si le conducteur avait mis son clignotant, je n’ai pas fait attention’) ; il lui appartenait en effet d’être d’autant plus vigilant à ce signal qu’il doublait sur une portion de route dangereuse signalée par une ligne continue sur laquelle se trouvait des pointillés permettant de tourner à gauche ;
– que l’attestation de Mme [Y] établie le 3 octobre 2017 n’était pas probante dès lors que le témoignage de cette personne ne résultait pas de l’enquête de gendarmerie auprès de laquelle elle ne s’était pas manifestée alors qu’elle avait prodigué des soins à Monsieur [W], que ce témoignage intervenait près d’un an après les faits, qu’il était contredit par les déclarations de Monsieur [C] ; en outre cette version des faits n’avait pu être corroborée par Monsieur [W] dans ses premières déclarations ;
– qu’en toutes hypothèses, la faute de la victime ayant contribué à son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l’autre conducteur.
En définitive, la lecture des pièces versées au débat et notamment de l’enquête de gendarmerie fait ressortir que le tribunal a analysé de façon précise et exacte les éléments de la cause.
Il a justement retenu que Monsieur [W] a commis une faute au sens de l’article 314-4 du Code de la route polynésien dès lors qu’il apparait qu’il ne pouvait pas effectuer le dépassement du véhicule de Monsieur [C] sans danger.
Selon l’article 4 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis.
Compte tenu des circonstances de l’accident, c’est à bon droit que le premier juge a considéré que la faute commise par Monsieur [W] est de nature à exclure en totalité son droit à indemnisation, l’a déclaré en conséquence responsable de l’accident de la circulation survenu le 7 octobre 2016 sur la commune de [Localité 8], et l’a débouté de l’ensemble de ses demandes.
Le jugement entrepris sera par conséquent confirmé sur le fond.
2. Sur les demandes de dommages et intérêts formées par Monsieur [C] et la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles pour appel abusif :
La cour ne décèle dans la procédure engagée, ni mauvaise foi, ni volonté de nuire, ni absence de fondement, et aucun élément permettant de considérer que le droit d’appel de Monsieur [W] a dégénéré en abus. Par ailleurs, ni Monsieur [C] ni la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles ne justifient d’un préjudice à l’appui de leurs demandes. Celles-ci seront en conséquence rejetées.
3. Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Aux termes de l’article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française : «Toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, sauf circonstance particulière résultant de l’intérêt ou de la faute d’une autre partie».
Le premier juge a retenu que chaque partie devait supporter ses propres dépens, sans caractériser aucune circonstance particulière justifiant qu’il soit dérogé au principe que ce texte énonce, alors qu’au surplus il a condamné Monsieur [W] au paiement des frais irrépétibles.
En conséquence, en l’absence au cas présent d’une telle circonstance particulière, le jugement dont appel sera infirmé de ce chef et Monsieur [W] sera condamné aux dépens de première instance mais seulement à l’égard de la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles qui en a fait la demande. Monsieur [W] sera également condamné aux dépens de l’instance d’appel.
Dès lors qu’il paraît inéquitable de laisser à Monsieur [C] et à la Caisse Meusienne d’assurances Mutuelles la charge des sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens, la décision du tribunal en ce sens sera confirmée et Monsieur [W] sera condamné à leur payer, à chacun, au titre des frais d’appel non compris dans les dépens, la somme de 120.000 F CFP au titre des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Confirme le jugement n° RG 18/00507 – n° Portalis DB36-W-B7C-CLGY en date du 14 octobre 2020 du tribunal civil de première instance de Papeete en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a dit chacune des parties supportera ses propres dépens ;
Statuant à nouveau de ce seul chef infirmé,
Dit que chaque partie supportera ses propres dépens de première instance, sauf la CAISSE MEUSIENNE d’ASSURANCES MUTUELLES ;
Condamne Monsieur [N] [W] à supporter les dépens de première instance de la CAISSE MEUSIENNE d’ASSURANCES MUTUELLES ;
Y ajoutant,
Déboute Monsieur [I] [C] et la CAISSE MEUSIENNE d’ASSURANCES MUTUELLES de leurs demandes de dommages et intérêts pour appel abusif ;
Condamne Monsieur [N] [W] à payer à Monsieur [I] [C] et à la CAISSE MEUSIENNE d’ASSURANCES MUTUELLES, pour chacun d’eux, la somme de 120.000 F CFP (cent vingt mille francs pacifique) au titre de leur frais d’appel non compris dans les dépens par application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;
Condamne Monsieur [N] [W] aux dépens de l’instance d’appel ;
Dit que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française pour ceux des avocats qui en ont fait la demande.
Prononcé à Papeete, le 12 mai 2022.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : K. SEKKAKI